« Là où il y a de l’argent, il y a de la corruption. Là où il y a beaucoup d’argent, il y a beaucoup de corruption ». Tout est dit ce qui n’empêche pas de lutter contre. C’est ce que fait Éliane Houlette, procureur du Parquet national financier qui répondait aux questions du Grand rendez-vous d’Europe 1.

Dans le sport comme dans l’économie, notamment numérique, la corruption et la fraude semblent très présentes. Témoin, les procédures de désignation des villes qui organisent les grands événements sportifs de la Planète. « A travers les dossiers dont disposent le Parquet, nous avons beaucoup de doutes et de soupçons », explique la procureure. « Les J.O. de Rio en 2016, soupçons de corruption ; Les J.O. de Tokyo en 2020, soupçons de corruption ; les championnats du monde d’athlétisme à Londres en 2017, soupçons de corruption ; Les championnats du monde d’athlétisme à Doha (Qatar), soupçons de corruption ; les championnats du monde en 2021 à Eugene (Oregon), siège de la société Nike[1], soupçons de corruption ». La liste est longue et accablante même si selon la formule consacrée, il faut appliquer la présomption d’innocence tant que la preuve par les faits n’a pas été apportée et que la condamnation n’a pas été appliquée.

Parallèlement au sport, l’économie numérique qui permet de délocaliser assez facilement les activités en fonction de la pression fiscale est également un domaine qui attire en ce moment l’attention du Parquet financier. L’opération Tulipe qui vise à la société Google a été menée dans le plus grand secret pendant plusieurs mois avec du matériel « hors connexion » tient à préciser Eliane Houlette pour garantir un maximum de sécurité. L’appellation Tulipe a été choisie parce que la société mère de Google France est immatriculée en Hollande. Cette désignation Tulipe a ainsi permis d’éviter l’utilisation du vrai nom de l’entreprise pour plus de confidentialité.

C’est cette enquête minutieuse qui a abouti à une perquisition mardi dernier au siège de Google à Paris. Suite à une plainte de Bercy en juin 2015 qui soupçonne le géant américain du numérique d’évasion fiscale, une centaine[2] de fonctionnaires du fisc et de la brigade de répression de la grande délinquance financière (BRGDF) était dans les locaux, avec le renfort de cinq magistrats du parquet national financier (Perquisition au siège de Google à Paris).

Rappelons que Google est la plus grande entreprise mondiale en termes a intervention surprise qui a surpris tout le monde – le ministère de la Justice a été prévenu le jour de la perquisition -, y compris les responsables de l’entreprise, a permis de collecter des masses considérable de données, « des téraoctets[3] » pour lesquelles des mois seront nécessaire pour les exploiter « par manque de moyen matériel et humain ». Car il ne s’agit là que un parmi 356 dossiers que traite actuellement le Parquet financier. Sachant que ce sont des enquêtes de grande ampleur qui couvre toute la planète[4].

Il manque en particulier des logiciels performants[5] de traitement de données que nous n’avons pas et dont le coût est estimé à 200 000 euros. Une source proche du dossier avait indiqué en février que le fisc français réclamait 1,6 milliard d’arriérés d’impôts au géant de la high-tech, un montant que n’avait pas confirmé Bercy.

La raison de cette opération est simplement le fait que Google France (qui emploie 700 personnes) ne paie pas d’impôts en France et préfère délocaliser, via des sociétés écrans, son activité dans des pays à pression fiscale plus faible, en l’occurrence l’Irlande. Si de telles pratiques sont connues de tous, elles sont beaucoup plus difficiles à documenter et à prouver. C’est la question dite de l’ « établissement stable[6] ». Cette intervention couvre l’activité de Google France de 2007 à 2011.

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[1] Evidemment, on ne peut pas ne pas penser aux J.O. de 1996 qui se sont tenus à Atlanta, siège de la société Coca-Cola, sponsor des J.O. depuis 1928

[2] 96 personnes exactement dont 25 experts en informatiques, 6 personnes du Parquet financier

[3] La procureure a en fait indiqué des « tetra-octets » de données. A la question, ça veut dire quoi ? Elle a répondu ça correspond à des masses considérables, plus que les données de l’opération Panama Papers.

[4] D’autres géants du numérique comme Amazon ou Facebook sont régulièrement accusées de vouloir échapper aux impôts, à la fois aux Etats-Unis et en Europe, en choisissant de s’installer dans des pays où la fiscalité leur est plus favorable

[5] Il semble pour le moins surprenant que l’Etat ne puisse pas « investir » qui n’est pas considérable lorsque l’on sait le montant des sommes en jeu à récupérer.

[6] L’impôt sur les sociétés frappe les bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France. La définition de l’établissement stable permet de déterminer quel pays est en droit d’imposer le résultat réalisé.

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