Avec Jordan Graison, Head of Sales chez Limonetik, Dickel Sooriah, VP Marketing EMEA chez Mirakl et Jean-Michel Chavanas, délégué général de l’association Mercatel

La crise sanitaire des derniers mois a contraint les commerces à baisser leur rideau du jour au lendemain. Durant le confinement, seuls ceux déjà dotés d’un site de vente en ligne bien référencé ou présents sur une marketplace ont pu poursuivre leur activité. Ainsi, au niveau mondial, le trafic sur Internet (+7%) et les conversions d’achats (+2,1%) n’ont eu de cesse d’afficher leur augmentation(Source Contentsquare). En France, CDiscount a par exemple annoncé sa surperformance durant la période et le géant mondial Amazon a ajusté de 20% à la hausse sa croissance prévisionnelle à fin 2020 (335Mds$).

Le baromètre digital 2019 de l’ACSEL affichait que pour les entreprises qui avaient fait le choix du digital celui-ci représentait 25% de leur chiffre d’affaires. Pourtant, paradoxalement, toutes les enseignes n’avaient pas encore sauté dans le monde du multicanal avant ce printemps. C’est donc dans un ordre pas toujours très ordonné, pour sauver ou tout au moins réduire l’impact du contexte, que de nombreux sites de e-commerce ont été développé avec une prédilection pour les sites de type place de marché.

Cette tendance forte ne se limite pas aux petits commerçants : « Plus de la moitié de l’e-commerce mondial passera par des plateformes. Cette croissance concerne actuellement principalement les secteurs Higt Tech et équipements de la maison » estime Dickel Sooriah, VP Marketing EMEA chez Mirakl.

Que ce soit à titre individuel ou via des groupements de commerçants, d’offices de tourisme, de municipalités, chacun a tenté ou tente de renouer avec le succès de la façon la plus réactive possible. Mais attention, en matière de marketplace particulièrement, le pari est risqué, car la réglementation est complexe. Si le modèle est séduisant, il peut être coûteux et lourd à mettre en place. Créer sa propre marketplace est un projet à ne pas prendre à la légère !

Vent en poupe pour les Marketplaces

Un constat s’impose : avec la crise liée au Covid-19, beaucoup d’entreprises se sont précipitées vers le digital. Ce nouveau terrain de jeu est certes très séduisant sur le papier mais il comprend des risques et de nombreux chemins de traverse.

« Il faut reconnaître qu’avec la crise sanitaire et économique, il y a urgence » explique Jean-Michel Chavanas, délégué général de l’association Mercatel. « Si la question des marketplaces est présente depuis plusieurs années, on assiste aujourd’hui à une accélération du phénomène chez de nombreux commerçants et d’indépendants qui ne voyaient pas jusqu’à aujourd’hui l’intérêt ni l’urgence de mettre en place de nouvelles formes de ventes et de visibilité. »

Si le concept de marketplace semble être devenu incontournable pour gagner des parts de marché, son intégration doit être considérée comme un projet d’entreprise à part entière qui nécessite un accompagnement global.

La crise comme accélérateur de prise de conscience

« Durant ces derniers mois, nous avons pu constater que beaucoup de marques se sont montrées très réactives avec l’instauration de ventes à distance et de livraison à domicile adoptées parfois en moins d’une semaine » poursuit Jean-Michel Chanavas.

À peine 48 heures après que le gouvernement français a demandé à la société Mirakl (en partenariat avec Limonetik et Webhelp) de créer une marketplace dans le but de mettre à disposition d’urgence des équipements de protection individuelle (EPI), une plate-forme était entièrement opérationnelle pour le milieu hospitalier, rassemblant quelques 30 millions de produits.

« Cet exemple témoigne de l’agilité du modèle, avec deux fonctionnalités principales : d’une part la mise en relation, d’autre part la transaction financière », explique Dickel Sooriah.

Gare aux belles promesses

« Nombreux sont ceux qui ont constaté que les commerces qui s’étaient déjà lancés dans la marketplace ont fortement augmenté leurs ventes et montrent plus de solidité face à la crise », assure Jordan Graison, Head of Sales chez Limonetik.

Mais attention aux belles promesses de la marketplace car si celle-ci est mal pensée au départ, elle peut s’avérer particulièrement coûteuse et chronophage.

« Un projet de marketplace doit être lié à un objectif fixé par l’entreprise. Celui-ci ne doit pas être trop ambitieux au départ ; il doit permettre de commencer sur un périmètre restreint pour s’étendre par la suite. La marketplace doit être scalable et pensée de la sorte » poursuit Jordan Graison.

Outre l’aspect purement technique et les processus de gestion à mettre en place, il faut prévoir de consacrer du temps pour recruter les vendeurs tiers ; l’étape de sélection des vendeurs s’inscrit dans une stratégie d’ensemble cohérente. De plus, il est important d’avoir une vision globale.

« Il ne s’agit pas simplement d’ouvrir un magasin, il faut s’assurer de l’approvisionnement en temps voulu, de la relation client et de la gestion du paiement », rappelle Jean-Michel Chavanas.

Comment s’y prendre concrètement ?

En d’autres termes, la marketplace n’est en aucun cas l’émanation d’un site d’e-commerce mais bien un nouveau canal de vente à part entière. Il est donc préférable de la créer au moment du lancement d’une nouvelle gamme de produits (plutôt que de basculer la totalité de ses activités sur une seule et même plateforme). Mieux vaut y aller pas à pas.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que l’aspect transactionnel est incontournable dans la mesure où les législations des différentes zones géographiques sont variables, complexes et les habitudes de paiement souvent très différentes d’un pays à l’autre (portefeuille électronique / wallet, virement, cartes bancaires, applications, prépayés, etc.). C’est pourquoi il faut s’entourer de partenaires expérimentés, capables de comprendre les enjeux et de prendre l’ensemble des risques afin de protéger les vendeurs et les acquéreurs.

3 clés pour réussir la création de sa propre marketplace

Pour Jordan Graison, n’est pas Deliveroo ou Airbnb qui veut, dans la mesure où la marketplace fait partie intégrante de leur modèle, ce qui n’est pas le cas des commerces. Il est donc primordial de se faire accompagner par des prestataires spécialisés.

En matière de paiement, le prestataire doit pouvoir prendre en charge la gestion totale des transactions, celle du paiement en ligne et l’ensemble des risques auxquels se confronte l’entreprise souhaitant se lancer dans la création d’une marketplace. Pour ce faire, il est essentiel de vérifier le périmètre des risques et des responsabilités ; par exemple, il faut déterminer qui se charge de la tenue de compte.

Dickel Sooriah insiste quant à lui sur la nécessité de bien définir une offre ciblée et cohérente ; éviter d’être trop généraliste. Pour cela, il est important d’identifier et de rassembler une communauté de vendeurs qui constituera le socle solide et nécessaire à l’entreprise pour atteindre cet objectif.

 

 

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