Visa Europe tire la sonnette d’alarme. Selon le spécialiste mondial des systèmes de paiements, l’Autorité bancaire européenne (ABE) a fait des propositions pour  mettre en place la SCA (strong customer authentication), ou authentification forte du client. Ce projet prévoit d’imposer des étapes supplémentaires d’authentification, comme la saisie de mots de passe, de codes, voire l’utilisation d’un lecteur de cartes, pour toute transaction en ligne au-delà de 10 euros.

Ces mesures mettraient fin au paiement en un clic, même auprès de sites marchands régulièrement fréquentés par le consommateur, ainsi qu’aux paiements rapides « in-app » au moyen d’applications où le client a enregistré les données de sa carte bancaire. Selon Visa, les 6,6 millions de Français qui ont déjà effectué un achat depuis leur mobile pourraient être découragés, et la moitié du commerce électronique grand public européen affecté. En effet, d’après une enquête réalisée par le spécialiste des transactions financières, 61% des consommateurs abandonneraient des achats si le processus de paiement en ligne était alourdi.

Visa estime que cette évolution porterait atteinte aux achats réalisés sur des sites en dehors du territoire européen, lesquels seraient obligés de se conformer à la nouvelle réglementation, faute de quoi les paiements seraient automatiquement refusés. L’enquête montre que 51% des Européens achètent actuellement en ligne auprès de distributeurs situés en dehors de l’UE, pour un total de plus de 9 milliards d’euros. Plus de 6 milliards d’euros de paiements pourraient ainsi être concernés.

Mais le projet ne concernerait pas que les sites de commerce en ligne. Les paiements par carte dans des lieux comme les péages ou les parkings, dans lesquels le code PIN n’est pas nécessaire actuellement, seraient eux-aussi affectés par la nouvelle réglementation, d’où des attentes plus longues.

Enfin, ce serait là un coup de frein aux nouveaux usages de consommation déjà entrés dans le quotidien des Français, comme les sites de l’économie collaborative qui proposent des solutions de paiement simplifié. Selon Visa, le m-commerce pesait en 2015 dans l’Hexagone un chiffre d’affaires de 6,4 milliards d’euros (+40% en un an) et la complexité des achats depuis son mobile affecterait cette dynamique.

« Nous sommes entièrement dédiés à la sécurité des transactions. Toutefois, la gestion du paiement est toujours un exercice d’équilibre entre la sécurité et la commodité. L’approche indifférenciée proposée aujourd’hui va trop loin dans une direction unique, limitant la possibilité des consommateurs d’acheter partout, à tout moment et depuis l’appareil de leur choix. Ceci irriterait les consommateurs et réduirait la capacité des commerçants à vendre leurs biens et services », explique dans un communiqué Gérard Nébouy, Regional Managing Director France de Visa. « Le commerce électronique est un symbole de réussite européenne alors même que l’économie est en berne. Cette initiative menace de ralentir la croissance et de réduire la compétitivité des entreprises européennes face à leurs concurrents partout dans le monde. »

L’EBA rendra sa copie définitive le 12 janvier prochain. Elle est censée répondre aux exigences de la Directive européenne sur les services de paiement (PSD2), qui rend obligatoire l’authentification forte du client (SCA) pour tous les paiements électroniques.