Channelnews a proposé à quelques personnalités de l’écosystème IT de partager trois ou quatre prévisions pour les acteurs du channel en 2017.

Voici les prévisions de cinq d’entre elles.

Laurent_GlaenzerLaurent Glaenzer, CEO of Lemon Operations

Nous avons travaillé l’année dernière avec plus de 500 partenaires dans 45 pays pour mettre en place des offres dans le Cloud. Les tendances que je vais évoquer ci-dessous ne sont donc pas propres au marché français et se reflètent de façon quasi uniforme dans le monde entier.

La première tendance est ce que j’appelle le « prêt-à-l’usage ». C’est un peu le même mouvement qui celui apparu à la fin des deux guerres mondiales dans la mode avec le passage du prêt-à-porter. Notre industrie est encore largement peuplée de « tailleurs sur mesure » qui construisent des solutions uniques pour leurs clients sur la base d’un cahier des charges. Ils sont de plus en plus nombreux à proposer des offres packagées constituées de technologies (provenant souvent de différents constructeurs) et de leurs services.

Ces offres ont l’avantage d’être plus faciles à mettre en place pour le client et plus rapides à vendre. C’est le cas de l’offre Powell 365 développée par le système intégrateur Expertime.

La seconde tendance est la prolifération des offres avec un prix à l’utilisateur et par mois. Très inspirées par les acteurs du SaaS, de plus en plus de systèmes intégrateurs ont compris les vertus d’un tel modèle qu’ils appliquent aux produits qu’ils revendent et aux services qu’ils fournissent. Le nombre de revendeurs commercialisant une offre de service au dessus de Office 365 avec un prix par utilisateur et par mois, ne se comptent plus.

La troisième tendance est la disparition progressive des frontières entre ce que l’on appelait les ISVs (acronyme qui tend à perdre de son sens) et de nombreux systèmes intégrateurs. La première catégorie tend à étoffer son offre de service, d’autant plus que les solutions SaaS l’amènent à intégrer l’infrastructure dans son offre. La seconde catégorie tend à accélérer la commercialisation d’offres qui intègrent leur propriété intellectuelle.

Ces trois tendances sont nées dans le Cloud bien souvent, mais reflètent surtout la volonté des acteurs de la distribution de vouloir industrialiser leur approche pour raccourcir leurs cycles de vente. Cette recherche de vélocité est aussi encouragée par l’accélération du rythme des innovations.

 

Abdelkrim_BennourAbdel Bennour, Executive Director Distribution Ingram Micro France

Les prestataires IT doivent compter sur plusieurs grandes tendances en 2017. Leur modèle économique va continuer d’évoluer vers plus de business contractuel, au travers du Cloud et des services, et moins de business transactionnel, même si ce dernier représente toujours la plus grosse part du chiffre d’affaires. Leurs collaborateurs devraient aller vers plus de spécialisation métier, qui est l’élément clé pour assurer une transformation efficace.

Deux nouvelles opportunités de marché devraient se matérialiser, notamment autour de la sécurité physique et électronique – une division spécialisée est en cours de création chez Ingram – et du smart home/smart office. La maîtrise de l’interopérabilité des protocoles sera la clé de voûte d’un virage réussi vers la domotique au sens consumer comme professionnel du terme.

Enfin, plus que jamais, les relations entre partenaires (clients et fournisseurs) seront basées sur l’authenticité pour une confiance décuplée et des prises de risques plus franches encore.

 


Denis Fouquet
, vice-president Europe South Region, Avnet TS

Tout d’abord quelques éléments macro-économiques qui devraient avoir une influence sur les marches IT :

En France, année d’élections, il faut s’attendre à une première partie d’année plus calme sur les investissements, le temps d’avoir une visibilité. On peut tabler sur un bon second semestre.

Au niveau global, le Brexit ne devrait pas avoir beaucoup d’impact côté IT car les besoins en investissement ne devraient pas baisser. La question est plutôt : où seront effectués ces investissements ? Aux USA, Trump pourrait générer un surplus de croissance lié à d’éventuels grands travaux d’infrastructure et à des dépenses d’armement. Ces dépenses devraient doper les investissements, voire la bourse, et peut-être arriver jusqu’à notre continent.

Parmi les mouvements propres à notre industrie susceptibles d’impacter le business, il y a la « digestion » de l’opération DELL/EMC, qui génère beaucoup d’attentes. D’autres opérations impliquant de grandes sociétés pourraient suivre (voir HPE acquérant Simplivity)… De même, l’acquisition d’Avnet par Tech Data, vue positivement par les marchés et les grands « Vendors », pourrait donner des idées…

Sur le plan purement français, beaucoup attendent du futur gouvernement des simplifications à tous les niveaux. Attention aux attentes trop fortes. On peut attendre une petite croissance sur le marché français des ventes de logiciels et services. Les segments Cloud et sécurité devraient continuer à avoir une forte croissance.

 

Emmanuel_TessierEmmanuel Tessier, secrétaire général d’Eurabis

En guise de prévisions, je citerais quelques paroles d’adhérents récoltées pour l’occasion.

Les prévisions de croissance 2017 tournent autour de 6-7 %. Mais il devient difficile de faire des prévisions quand on arrive en période électorale, et que beaucoup de choses se mettent en stand-by…
Les principales difficultés rencontrées sont le recrutement et les contraintes administratives. Le social se complique de plus en plus.
« On ne demande pas d’aide ; on demande simplement de nous laisser travailler en paix ».
La concurrence de certains constructeurs, qui ont des sites de vente en ligne, pourrait devenir un « souci ».

 

Xavier Gerardin, DG Project SI, et co-président de Sagesse
La révolution Cloud est en train de bouleverser définitivement l’ensemble de l’écosystème IT. Mais elle impose de revoir en profondeur les stratégies commerciales/marketing/financières du channel.

En ajoutant la dynamique technologique, les nouveaux besoins en termes de consumérisation des outils professionnels et, bien sûr, une demande accrue de transition digitale des entreprises clientes, les effets de bords sont nombreux pour toutes les typologies d’acteurs du channel :

Les entreprises de pure négoce IT se transforment en des sociétés plus typées digital (via du e-commerce, du web referencing…) ; les sociétés de services se verticalisent en se spécialisant sur certaines expertises métiers et en imaginant des « bouquets de services » à valeur ajoutée ; cette transformation atteint également les ISV/éditeurs métiers, sous réserve d’être à jour des nouvelles technologies de développement liées au Web et maîtriser l’interopérabilité de leurs solutions avec des solutions cloud du marché.

D’une manière générale, on observe un phénomène de concentration lié au changement de modèle de valorisation des entreprises, à la recherche d’expertise et de taille critique (notamment pour faire face à la concurrence directe de certains partenaires/éditeurs ou au développement de nouveaux pure players cloud). Ces dynamiques génèrent les contraintes suivantes pour le channel :

Sur le plan social : des difficultés de recrutement et/ou de formation de nouvelles compétences sur des profils « cloud ready ». Les éditeurs type gestion Sage-Cegid ne sont hélas pas proactifs sur ces questions pour leurs partenaires. Nous constatons un vrai déficit de compétences numériques en France pour bien accompagner les entreprises dans leur transformation digitale.

Sur le plan financier : le channel doit aussi s’équiper de solutions de gestion adaptées pour pouvoir gérer des nouveaux process administratifs du type abonnement, prélèvement, contrats…

Sur le plan juridique :  le channel doit se structurer pour adapter ses contrats et les moderniser (contrat tripartites, signature en ligne…).

Sur le plan Marketing/Communication : le channel doit imaginer des offres packagées, les marqueter, se différencier, travailler sa notoriété … pour susciter l’intérêt. Il ne plus se contenter de copier la communication institutionnelle et traditionnelle de ses fournisseurs.

Le channel est en forte attente d’accompagnement et de conseil de la part de ses partenaires (éditeurs, constructeurs, hébergeurs, opérateurs… ) pour bien réaliser sa propre transformation numérique et l’aider à mieux adresser commercialement et « marketingment » ses clients et ses prospects…

Mon constat est que les acteurs traditionnels, notamment les éditeurs de logiciels, font preuve de très peu d’originalité et de créativité dans l’accompagnement de leurs partenaires. La copie proposée reste très traditionnelle. Elle remet de l’interdépendance dans la relation commerciale. Les fournisseurs se contentent bien souvent de proposer des modèles de ventes avec des marges réduites et des nouveaux produits non matures ni adaptés au marché actuel. Ils devraient plutôt aider le channel à générer plus de valeur, à inventer de nouveaux services cloud et à trouver de nouveaux marchés de manière plus ciblée.