Sceptique sur la réalité de la pénurie de main d’œuvre dans le secteur IT, Régis Granarolo, président du Munci, confirme cependant l’accélération des recrutements. Mais il n’entrevoit pas de hausse des salaires…


Channelnews : Depuis la fin de l’automne, société de services informatiques et prestataires IT sont unanimes : le recrutement est redevenu plus que tendu. De votre côté, vous continuez à proclamer comme vous l’avez toujours fait que cette pénurie de main d’œuvre dont tout le monde parle relève du mythe. On ne reviendra pas sur votre démonstration, qui pointe notamment les contadictions des études disponibles, les recrutements bidons, le manque d’attractivité des sociétés de restations de services, la dévalorisation des métiers de base de l’informatique, la sélectivité des employeurs, la ruée sur les nouvelles compétences, etc. Ceci étant dit, êtes-vous d’accord pour parler de reprise dans le recrutement IT ?


Régis Granarolo : Sans aucun doute. D’ailleurs, elle ne date pas d’hier. Mais elle s’accélère très nettement depuis quelques mois. Il suffit pour s’en convaincre de regarder l’évolution trimestrielle de l’emploi salarié des activités informatiques et services d’information de l’INSEE. L’effectif du secteur est ainsi passé en l’espace de 15 mois de 312.300 à 330.900 salariés au 31 mars dernier. Avec une progression de près de 5.000 salariés au cours de trois derniers mois. Mais plus que le nombre d’offres d’emploi ou de recrutements, ce sont les chiffres du chômage qui sont les plus parlants : au rythme actuel de sa décrue, nous devrions retrouver une situation de plein emploi dans le secteur IT d’ici 8 à 12 mois. On estime en effet que le nombre de chômeurs peut difficilement descendre en dessous de 15.000 à 18.000 dans le secteur, ce qui correspond au chômage frictionnel. En un an, le nombre de créations nettes d’emplois dans le secteur des services informatiques aurait ainsi atteint 14.000 à comparer aux 9.000 des années précédentes.

Dans ces conditions, pensez-vous que cela puisse conduire à une inflation des salaires comme certains le suggèrent ?


Régis Granarolo : Je serais beaucoup plus prudent sur ce chapitre. S’il est exact que les jeunes ingénieurs diplomés peuvent actuellement prétendre obtenir des primes à l’embauche de l’ordre de 5% à 10% en Ile-de-France et que les salaires augmentent plus rapidement en début de carrière, dans l’ensemble les salaires n’augmentent pas. La dernière étude Expectra publiée le mois dernier montre même que le salaires des cadres à l’embauche dans le secteur informatique et télécoms n’aurait progressé que de 0,4% entre septembre 2010 et mars 2011, tandis que la hausse s’établissait en pmoyenne à 2,9% en moyenne pour l’ensemble des secteurs. Cette stagnation des salaires accentue l’attractivité des entreprises utilisatrices au détriment des SSII et la dévalorisation des métiers techniques (développeurs, spécialistes systèmes et réseaux…) qui sont pourtant les plus consommateurs de nouvelles recrues, au profit des métiers du conseil et de la gestion de projet. On voit ainsi de plus en plus couramment des débutants propulsés chefs de projet, contre toute logique.