Pour Christian Bittebierre, vice-président Europe d’Ingram Micro, le problème des encours est aujourd’hui résolu. Il constate un redémarrage du marché et espère revenir au CA 2008 dès 2010.

 


Channelnews : Comment ont évolué vos facturations en 2009, sachant que votre maison mère a annoncé une chute de 18% du chiffre d’affaires pour la région EMEA (et -14% au niveau mondial) ?

Christian Bittebierre : Je ne suis pas habilité à communiquer sur les chiffres de la filiale française. Tout ce que je puis vous dire, c’est que nous avons connu une décroissance en 2009 (entamée en 2008) mais que nos ventes ont recommencé à progresser depuis septembre 2009 avec un taux à deux chiffres certains mois.

Quelles ont été les conséquences de cette baisse de chiffre d’affaires, notamment en termes d’effectifs ?


Christian Bittebierre : Il a fallu adapter les coûts opérationnels. Au niveau des effectifs, nous n’avons pas fait de coupe sombre mais nous avons fait attention sur les renouvellements. Aujourd’hui Ingram Micro France compte 430 personnes contre environ 500 mi-2008. Comme tout le monde, nous avons aussi dû mettre en place des solutions alternatives pour compenser la réduction des encours qui s’est faite sentir début 2009.

Quelles formules d’encours avez-vous privilégié ? Certains revendeurs nous ont rapporté que vous n’appliquiez pas le système de complément d’assurance publique (CAP et CAP+) mis en œuvre par l’Etat.


Christian Bittebierre : C’est inexact. Le CAP+ fait toujours partie de notre arsenal de solutions de crédit mais nous avons eu très peu de demandes car c’est une formule relativement onéreuse, que l’encours soit utilisé ou non. Nous avons plutôt utilisé des encours maison. Leur attribution était soit automatique, à l’image de l’opération « crédit coup de cœur » qui a bénéficié à plus de 3.000 de nos clients, soit à la demande en fonction des besoins exprimés.

Vous en parlez au passé. Ces dispositifs ne sont-ils plus en vigueur ?


Christian Bittebierre : Si. Mais nous n’utilisons plus notre réserve de crédit qu’à hauteur de 30% de sa limite. La baisse des chiffres d’affaires et l’amélioration des délais de paiements suscités par la loi LME ont permis aux revendeurs de réduire leurs besoins en fonds de roulement et donc d’encours. Du coup, bien que les engagements des assureurs ne soient pas revenus à leur niveau d’avant crise, les crédits disponibles couvrent largement les besoins réels. On peut dire que la situation est redevenue normale sur ce front.

Mais ne craignez-vous pas une recrudescence des défaillances en 2010 ? A la lumière des bilans, forcément mauvais, de 2009, les organismes financiers pourraient être tentés de donner un nouveau tour de vis. La reprise, si elle se confirmait, pourrait même aggraver ce nouvel assèchement du crédit, n’est-ce pas ?


Christian Bittebierre : Si les banques et les assureurs reproduisent les mêmes comportements d’analyse qu’il y a deux ans, c’est le dépôt de bilan assuré pour tous. S’il n’y a pas eu de faillite retentissante dans l’IT en 2009, il faut tout de même dire que le nombre de défaillances a doublé, voire triplé. Le gouvernement est conscient du risque et a demandé aux banques à faire preuve de souplesse cette année. Faire de la décroissance en période de récession n’a pas la même portée qu’une baisse de chiffre d’affaires en période de croissance. L’aspect positif que je vois dans cette crise, c’est que les revendeurs qui auront réussi à réduire leurs effectifs en 2009 devraient voir leur taux de rentabilité s’améliorer sensiblement si le marché redémarre.

Vous croyez donc à une reprise ?


Christian Bittebierre : Il y a un certain nombre d’indicateurs laissant penser que l’année 2010 sera extrêmement positive. Gartner vient ainsi d’annoncer qu’il anticipait une reprise de l’ordre de 20% sur le marché des PC. Par ailleurs, la remontée du dollar, confortée par la remontée inéluctable des taux américains en juillet-août, devrait contribuer à enrayer la baisse des prix, voire à les faire remonter légèrement. Si elles se prolongeaient, les ruptures d’approvisionnement endémiques que nous connaissons depuis septembre – et à l’ampleur jamais vue jusqu’alors – pourraient également alimenter cette remontée des prix.

Sur quels produits pensez-vous aller chercher cette croissance et quelles sont vos prévisions pour 2010 ?


Christian Bittebierre : Sur tous les produits : les consommables, les accessoires, les PC, les composants, les produits valeur… Concernant les PC, le gros de la déferlante netbooks est passée. Nous devrions voir monter en puissance les ultra-portables, les PC ULV (ultra low voltage), les tablettes tactiles, les tout-en-un, les smartphones… Nous sommes bien partis pour refaire le chiffre d’affaires 2008 dès cette année.

Où en êtes-vous du développement de votre division valeur ?


Christian Bittebierre : Notre division valeur se porte bien et pèse aujourd’hui environ 20% de nos ventes contre 15% il y a un an. Et notre objectif est d’accroître encore son poids. C’est une stratégique à long terme qui doit nous permettre de retrouver de la marge. Nous allons notamment relancer notre activité serveurs en ajoutant de nouvelles marques (aujourd’hui l’offre est limitée aux serveurs Fujitsu, HP et Acer). Nous aimerions aussi obtenir ladistribution de l’offre data centers de Cisco ou accompagner Microsoft sur la virtualisation. Nous réfléchissons également au meilleur moyen de s’adapter à la montée en puissance du XaaS (infrastructures, plates-formes et logiciels fournis sous forme de service).

Pour parliez de Smartphones. C’est pourtant un marché très lié aux opérateurs qui les couplent avec des abonnements téléphoniques. Pourquoi ne pas distribuer de l’abonnement comme le font certains grossistes spécialisés ?


Christian Bittebierre : Nous avons essayé il y a trois ou quatre ans. Sans succès. Nous n’avions pas le système adéquat et les compétences pour gérer cette partie abonnement. Il nous faudrait au bas mot une équipe de 15-20 personnes et investir dans un système dédié. C’est une décision stratégique que les US n’ont pas souhaité prendre, estimant que l’évolution des marges sur ce marché n’était pas favorable. Nous nous concentrons sur la vente des produits nus.