À l’heure où Ingram Micro et Also officialisent leur plateforme d’agrégation cloud, emboîtant le pas à Arrow et à Tech Data, nous nous sommes demandé si ces plateformes avaient trouvé leur marché et ce qu’en pensaient leurs utilisateurs.


Aiguillonnés par les marques et soucieux de demeurer la source d’approvisionnement incontournable des prestataires de proximité à l’ère de l’informatique 100% dématérialisée, les principaux grossistes IT ont mis en service des places de marché censées permettre à leurs clients de distribuer des services cloud aussi simplement que des boîtes. Opérationnelles depuis déjà plus de deux ans pour certaines, ces plateformes répondent-elles aux attentes de ceux pour qui elles ont été conçues ?

Autant le dire d’emblée, nous n’avons pas identifié beaucoup de leurs clients. Et aucun des grossistes mentionnés n’a répondu à nos sollicitations pour nous aiguiller vers quelques-uns de leurs utilisateurs. Un silence éloquent en soi. En revanche, de nombreux prestataires ont accepté de nous expliquer pourquoi ils n’utilisent pas ces plateformes.

Les intégrateurs préfèrent produire eux-mêmes leurs services hébergés

La principale raison avancée est qu’ils préfèrent produire eux-mêmes leurs services hébergés. « Ceci afin d’assurer un niveau de marge [et de] réactivité suffisants », comme l’explique un intégrateur parisien. « Les clients sont plus rassurés par des solutions [issues d’acteurs] de proximité […] maîtres de toute la chaîne », souligne le patron d’un intégrateur alsacien, qui assortit ces solutions d’une offre complète de services managés. « Nos clients attendent de nous une forte réactivité en cas de besoin d’assistance à l’exploitation ou en cas d’incident et donc un service de proximité », renchérit un troisième intégrateur du Sud Est de la France, qui exploite trois datacenters à Montpellier, Monaco et Toulouse.

Le cas échéant, ils complètent leur offre en relayant les services de tiers (typiquement les offres SaaS de Microsoft, de SAP ou d’IBM mais également les offres de petits éditeurs tels Sellsy ou d’acteurs tels que Jaguar, Nerim, etc.) avec lesquels ils se débrouillent pour être en relation directe.

Des alternatives ponctuelles loin d’être incontournables

Néanmoins, ils concèdent que ces plateformes peuvent « représenter des alternatives ponctuelles dans certains cas », voire être « facilitateur de transition vers le modèle Cloud » et qu’ « un intégrateur ou un revendeur qui n’a pas les moyens financiers de construire ses propres solutions cloud [peut] trouver chez les grossistes un moyen de répondre à une demande du marché ». Mais de là à penser que ces plateformes puissent devenir des « points de passage obligés », il y a un gouffre que peu se risquent à franchir.

Même ceux qui nont pas de plateforme d’hébergement en propre, n’y croient pas : « il est désormais facile de proposer des solutions de type SaaS/Cloud en [faisant intervenir] un hébergeur [tiers] – Softlayer, Azure, OVH voire des régionaux/locaux, avec qui les clients finaux ont leurs « habitudes » – et [en y ajoutant] sa palette de services complémentaires », détaille le patron d’une société de services nantaise qui a été un temps utilisatrice de la plateforme Arrowsphere.

Un intermédiaire de plus

« Les modèles courts vont s’imposer », estime pour sa part Olivier Pochard, directeur du développement de Nerim, qui ne voit les grossistes que comme « un interlocuteur de plus ». Un avis partagé par l’un des éditeurs ayant été référencé sur deux des plateformes concernées : « aucune ne nous a apporté de business, déclare-t-il tout net. Les seuls contacts que nous avons eu se sont transformés en relation directe avec le revendeur, la plateforme n’ayant pu traiter techniquement. On ne vend pas du service comme un ordinateur dans une boite ou alors les clients vont directement souscrire leur Gmail ou leur Office 365 ».

Seul Michel Rathier, directeur général d’Altix Solutions se montre convaincu de l’intérêt de ces plateformes : « certaines solutions [proposées] sont [particulièrement] pertinentes, comme SKYKICK, [– sur la marketplace d’Ingram Micro –] qui permet la migration en ligne simple et rapide de tout type de messageries vers Office 365. La marketplace Ingram permet également au revendeur de personnaliser une page à son image, pour présenter ses propres services, avec un accès sécurisé à ses clients. Le gain de temps apporté dans la relation client est fondamental. Le critère d’efficacité ou plutôt de rapidité pour présenter, acquérir et déployer une solution, est ce qui fera demain la différence. En ce sens, les cloud market place [sont pertinentes]. »