Le Big Data intéresse au plus haut point les cabinets d’analyse. Deux études sur le sujet viennent d’être publiées à quelques jours d’intervalle, la première par Deloitte, la seconde par Ernst & Young, avec des conclusions quelque peu différentes.

 » De nombreuses entreprises sortent de l’attentisme : la digitalisation les submerge de données, tandis que la crise les incite à en tirer meilleur parti pour capter de la croissance ou améliorer leurs marges. Elles entrent donc en phase expérimentale, souvent sans attendre d’avoir résolu toutes les questions stratégiques, organisationnelles ou technologiques soulevées par le Big Data « , écrit Deloiite dans la présentation de son étude avant d’ajouter  » Que ces tentatives aboutissent ou échouent, les entreprises engrangent de l’expérience et en tirent de précieux enseignements : importance de la pluridisciplinarité, du croisement des données issues du off- et du online, d’une approche flexible et itérative « .

Chez Ernst & Young, qui a interrogé plus de 150 entreprises françaises de toutes tailles on est plus réservé.
 » Si tout le monde semble s’être emparé du sujet, des plus sceptiques, qui y voient une nouvelle bulle prête à faire « pschitt », à ceux pour qui il s’agit d’un véritable big bang — du même ordre que les précédentes révolutions industrielles — force est de constater qu’à ce jour, la révolution Big data ne s’est guère propagée au-delà des modèles économiques des grands acteurs globaux du digital (…). Seule une minorité d’entreprises peut se targuer d’une maturité élevée dans son exploitation de la data, tandis que la majorité adopte une posture attentiste, sans véritablement savoir par quel bout prendre un concept devenu flou « .
Le cabinet recense un certain nombre de freins au développement du Big Data : une collecte de données clients encore sous-exploitée, des capacités inadaptées en matière de traitement et l’analyse des données clients, la data non perçue comme un support aux décisions stratégiques, les enjeux encore sous-estimé en matière de vie privée et de sécurité, l’absence de mesure du ROI, le manque de transversalité dans la gestion des projets ou encore une analyse encore trop peu orientée vers le prédictif et le temps réel.

Des leviers bien réels

Les deux cabinets se rejoignent toutefois sur un point : il existe plusieurs leviers d’action en faveur du traitement des données massives.

Deloitte s’intéresse notamment aux nouveaux outils qui favorisent leur prise en main par des non-spécialistes, tels par exemple les outils de Data Visualisation.   » Les métiers et diverses fonctions (Finance, RH, Achats, etc.) inscrivent ces approches analytiques au cœur de leurs enjeux, convaincus qu’elles recèlent leurs futurs gains de performance « , estime Reda Goméry, associé responsable Data & Analytics.
Ce dernier recense également – du moins dans certains secteurs privilégiés tels que les télécoms et les services financiers – une prise de conscience de la valeur de leurs données pour des partenaires externes.

Ernst & Young énumère de son côté des facteurs clés de succès du déploiement d’une stratégie Big data. A condition toutefois que le projet soit déjà clairement identifiée ce qui, on l’a vu, est rarement le cas.

Ces leviers sont principalement une transversalité inter-directions en amont à travers une équipe projet rassemblant des profils d’informaticiens, de chefs de produits marketing, de financiers, d’analystes statisticiens, de juristes… A cela s’ajoute bien entendu une implication forte de la direction générale, sans oublier la mise en place d’un Agile Analytics Program permettant un cadrage stratégique des enjeux et opportunités.
Dernier facteur clé de succès : la confiance by design. Celle-ci passe par la prise en compte, en amont de tout projet Big Data, des enjeux de risques techniques, juridiques et réputationnels.  » Les directions informatiques et juridiques en particulier doivent créer ensemble les conditions du partage non biaisé d’informations clés, notamment de données à caractère personnel, pour la pertinence des modèles prédictifs « . Un pré-requis qui n’est pas le plus facile à établir.

Alors, prêt pour le grand saut ?

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