La valorisation des entreprises du numérique. C’est le sujet on ne peut plus sérieux auquel vient de s’attaquer la Fédération EBEN en commandant un livre blanc à un expert en la matière : la banque d’affaires Crescendo Finance, spécialisée dans l’accompagnement des sociétés IT (ESN, éditeurs, Intégrateurs, distributeurs, sociétés de conseil, opérateurs, services providers…) dans leurs fusions-acquisitions. Dévoilé début mai, ce livre blanc a été conçu pour aider les dirigeants d’entreprises de services numériques ayant le projet de transmettre leur entreprise dans le cadre d’un départ à la retraite, d’un adossement industriel ou d’un changement d’activité, à anticiper la cession et à se poser les bonnes questions afin de valoriser au mieux leur entreprise.

En préambule, Crescendo rappelle que l’estimation de la valeur d’une entreprise n’est pas une science exacte, qu’elle dépend des caractéristiques de l’entreprise (taille, rentabilité, spécificités, etc.) mais aussi des anticipations faites sur l’avenir de l’entreprise et de la personne qui va la mettre en œuvre. Les spécificités de l’entreprise pourront faire l’objet d’un diagnostic stratégique préalable afin d’en déterminer l’impact sur la valorisation. Crescendo précise également qu’il ne faut pas confondre la valeur de l’entreprise avec son prix de vente, qui est soumis à la loi de l’offre et de la demande.

Pour valoriser une entreprise, la méthode la plus répandue est la méthode comparative, qui consiste à estimer sa valeur à partir de l’étude de transactions comparables observées sur le marché, explique Crescendo. Puis, l’auteur passe en revue les différentes méthodes pour déterminer la valeur de marché des capitaux propres (Vcp) d’une société. Pour les entreprises non cotées, la méthode la plus courante s’appuie sur trois indicateurs de référence : l’EBIT (Earnings Before Interest and Taxes), qui correspond en simplifiant au résultat d’exploitation (1), l’endettement net (2) et le coefficient de valorisation du marché (voir ci-après).

La formule de référence est ainsi : Vcp = coefficient x EBIT – endettement net.

Selon Crescendo, les coefficients constatés actuellement sur le marché des entreprises de services du numérique sont les suivants :

  • Chiffre d’affaires inférieur à 10 millions : coefficient de 6
  • Chiffre d’affaires compris entre 10 millions et 50 millions : coefficient de 7
  • Chiffre d’affaires supérieur à 50 millions : coefficient de 8 et plus (3)

Par exemple, la valeur d’une entreprise de services du numérique réalisant un chiffre d’affaires entre 10 millions et 50 millions est d’environ 7 fois l’Ebit. Crescendo précise que cette entreprise doit être positionnée sur des technologies en vogue et remplir les critères suivants : au moins 75% du chiffre d’affaires réalisé avec des clients en directs, au moins 75% du chiffre d’affaires réalisé avec des consultants salariés et absence d’une dépendance économique vis-à-vis de clients (taux inférieur à 25%).

Si l’un de ces critères n’est pas rempli, une décote sera appliquée au coefficient. Sur les entreprises de moins de 10 M€, et a fortiori pour la majorité de celles concernées par la Fédération EBEN, le ratio est plutôt de 6, voire moins, si ces sociétés ont une part de leur CA non négligeable constituée de négoce et non de services.

« Dans le cas d’une entreprise de services numériques réalisant des prestations d’infogérance, il convient de prendre le chiffre d’affaires récurrent comme [indicateur de référence] que l’on multipliera par un multiple oscillant entre 0,8 et 1,2 […] selon la nature de la prestation, sa durée, sa marge et sa reconduction », précise Crescendo. Une société d’infogérance ayant des contrats long terme (3 ans) reconduits par tacite reconduction se valorisera mieux qu’une société disposant de contrats court termes (1 ans) non reconduits par tacite reconduction.

« Dans le cadre d’une négociation avec un repreneur, il est légitime de retraiter différents montants dans le compte de résultat, soit en addition soit en soustraction de l’EBIT », poursuit Crescendo. Selon les cas, il peut être judicieux « d’effectuer un lissage lors de variations importantes d’un exercice sur l’autre, d’ajuster les dotations/reprises de provisions, de retraiter les charges exceptionnelles (non récurrentes) figurant dans les charges courantes ou à l’inverse de reclasser les charges courantes et récurrentes figurant en charges exceptionnelles, d’ajuster les coûts et « charges » des dirigeants »…

 

(1) EBIT = Résultat d’Exploitation (REX) – Intéressement & participation – Dotations aux amortissements exceptionnel

(2) Endettement net = Endettement Brut (montant total des dettes financières moyen et long terme) – Trésorerie Nette (montant des disponibilités et valeurs mobilières de placement, diminué de l’ensemble des dettes financières cout terme).

(3) À noter que le coefficient constaté pour les valeurs technologiques cotées, sociétés dépassant les 100 m€ de chiffre d’affaires est de 11, coefficient basé sur un échantillon de 10 sociétés du secteur des entreprises des services du numérique au 16 février 2017.