La filiale française du distributeur européen a vu son activité reculer de 11,5% au premier semestre. Une mauvaise performance pour moitié liée à sa migration vers SAP, selon Henri Viard, son directeur général.


Computacenter France a publié un chiffre d’affaires en recul de 11,5% pour le premier semestre de l’année 2013. Que s’est-il passé, sachant que le premier semestre 2012 avait déjà été marqué par un recul de l’activité à périmètre constant (-7%) ?

Henri Viard : Comme nous l’avons indiqué dans notre communiqué, il y a deux raisons principales : la mauvaise orientation du marché français et notre migration vers SAP au mois de juin. Un chiffre résume à lui seul la situation de l’économie française : l’investissement des entreprises a reculé de 6% au premier semestre. Cela signifie que cela a été encore pire pour l’investissement informatique : une chute probablement à deux chiffres. Car quand l’économie croit, les dépenses IT progressent d’un facteur deux à trois, mais quand la décroissance s’installe, l’IT accélère dans l’autre sens.

Plus de la moitié de notre contre-performance est liée au démarrage de SAP. Ainsi, nous n’avons fait sur le mois de juin que les deux tiers du chiffre d’affaires que nous aurions dû réaliser en temps normal. Malgré les milliers d’heures de formation en amont, les ateliers organisés pour identifier les écarts de processus, la hotline mise en place pour répondre aux questions fonctionnelles et techniques, nous avons subi de nombreux points de blocage. Notamment les quinze premiers jours. Tout a pris plus de temps. Face à ce nouveau système, on a tous été embauchés le même jour et il a fallu acquérir de nouveaux réflexes.

Avez-vous réglé tous vos problèmes à ce jour ?

Henri Viard : Il reste encore quelques scories mais c’est de moins en moins visible pour les clients. Notez que notre migration s’est plutôt mieux passé qu’en Grande-Bretagne ou en Allemagne, puisque nous avons appris de leur expérience. Mais nous avions aussi un plus grand saut technique à accomplir. La bonne nouvelle, c’est que le chiffre d’affaires qui n’a pas pu être facturé au premier trimestre n’a pas été perdu. Ce qu’on n’a pas livré en juin, on l’a livré en juillet. La page SAP sera définitivement tournée d’ici à quelques semaines et on va pouvoir penser encore plus aux clients.

Quels bénéfices attendez-vous de SAP ?

Henri Viard : Une meilleure visibilité sur notre backlog d’activité. On sait à chaque instant où on en est du process et les tâches qu’il reste à accomplir. Au final, on devrait aboutir à une meilleure qualité rendue aux clients et une meilleure fluidité dans nos process.

La distribution de produit a été plus affectée (-13,4%) que les services (-1,6%). Pourquoi ?

Henri Viard : Historiquement, la croissance des services est plus élevée que celle de la distribution. Et ils n’ont pas été réellement impactés par le passage à SAP. Le plus souvent, on utilise les outils de nos clients pour gérer ces activités. Seuls aspects gérés par SAP : la planification et les flux de pièces détachées. Toutefois, il faut bien distinguer deux familles de services qui obéissent à des dynamiques différentes. Les services professionnels (conseil, projets, régie) ont reculé de 16%. Ils font aussi partie de ces dépenses que les entreprises coupent en premier lors des périodes de contraction des investissements. En revanche, rien de tel pour les services managés, qui sont assortis à des engagements, des clauses de dédit… Ils ont enregistré une forte croissance sur le semestre.

Le recul de l’activité au premier semestre 2012 avait été compensé par la croissance du deuxième semestre. Au final, l’activité était restée stable sur l’année. Vous attendez-vous cette année encore à un meilleur second semestre ?

Henri Viard : On devrait terminer l’année sur un meilleur résultat qu’au premier semestre. Mais je reste très réservé sur la croissance que l’on peut attendre sur ce second semestre. Je ne vois pas l’esquisse de l’ébauche d’une reprise de l’économie, ni d’indicateur annonçant une reprise des investissements.

Au contraire, les statistiques de la Banque de France nous annoncent une nouvelle pression sur les prix. Je crains que les entreprises ne soient poussées à retravailler leurs contrats récurrents pour réduire leurs coûts et qu’elles continuent de geler leurs projets.

Pour que les clients recommencent à investir, il faudrait que la confiance en l’avenir revienne. Peut-être que le gouvernement parviendra à provoquer un déclic. En attendant, je suis frappé de voir le différenciel qui existe entre la France et des pays comme les USA. Les technologies de l’information sont considérées comme une variable d’ajustement en France alors qu’aux USA, elles sont plutôt perçues comme un facteur de compétitivité. Je pense qu’on n’investit pas assez dans ce secteur en France et qu’on prend du retard.